Le débrayage se poursuit dans le secondaire

Malgré les menaces du ministère de l’éducation

Le débrayage se poursuit dans le secondaire

El Watan, 8 mars 2010

Reprise des cours dans les paliers inférieurs et poursuite de la grève dans le secondaire. En effet, malgré les menaces de représailles proférées à leur encontre par le ministère de l’Education nationale, les enseignants du secondaire ont poursuivi, hier, leur mouvement de grève. C’est ce que nous avons constaté au niveau des lycées d’Alger.

Les établissements scolaires, où les professeurs sont affiliés au Cnapest, sont restés fermés durant toute la journée d’hier. « Nous sommes en grève et n’avons peur de rien. S’ils veulent nous licencier parce que nous avons soulevé des revendications légitimes, qu’ils le fassent », lance une enseignante au lycée Omar Racim d’Alger-Centre. Comme elle, de nombreux enseignants ont commenté « la réaction musclée du ministère et du gouvernement », qui, selon eux, « démontre à l’opinion le vrai visage de nos autorités ». « Je suis pauvre. Je n’ai que ce salaire pour nourrir mes enfants, mais s’ils veulent me radier, je ne perds rien », tonne une autre enseignante. Alors que le ministre de l’Education nationale, Boubekeur Benbouzid, évoque « une reprise du travail par 92% des enseignants », le Cnapest, lui, affirme le contraire. Selon le secrétaire général du syndicat, Nouar Larbi, le taux de suivi de la grève a atteint 85%. « Même les enseignants ayant repris le travail dans la matinée par crainte ont débrayé dans l’après-midi », lance-t-il. Hormis les lycées, les cours se sont déroulés d’une manière ordinaire dans le primaire et le moyen.

Les enseignants dans ces deux paliers ont respecté la décision du conseil national de l’Unpef qui a appelé la veille à la reprise des cours. Si la grève fait partie du passé pour les élèves des paliers inférieurs, pour ceux du secondaire la situation n’est pas encore claire. Ils doivent attendre la décision du conseil national du Cnapest qui tranchera la question de la grève aujourd’hui. « Le conseil national est la seule instance délibérante de notre syndicat. Nous avons des paramètres à prendre en considération, dont les menaces des pouvoirs publics et la volonté des enseignants. Aujourd’hui (hier, ndlr), nous avons tenu des conseils de wilaya et les décisions qui seront prises seront entérinées par le conseil national », souligne Nouar Larbi.

Des options pour le rattrapage des cours

Les responsables des deux syndicats se sont montrés outrés par la batterie de mesures répressives annoncées par le gouvernement. « La menace de dissolution de notre syndicat ne repose sur aucun argument législatif. En s’attaquant à des syndicats représentatifs, le ministère prouve encore une fois sa volonté de ne maintenir que des organisations clonées qui ne le dérangent point. Cela confirme également que le même ministère ne se soucie pas du respect des lois », lance Nouar Larbi. Et d’ajouter : « Comment veut-on que l’enseignant qui travaille sous la menace et avec la crainte soit performant. Ce n’est pas possible ! A moins que la tutelle souhaite former des gens craintifs et peureux qui ne revendiquent plus. » Soulignant que les enseignants qui sont des descendants de Larbi Ben M’hidi tiennent toujours à leur dignité, notre interlocuteur relève l’inefficacité des menaces du ministère. « Les responsables de la tutelle manquent de pouvoir discrétionnaire. C’est pour cela que tous les arguments qu’ils ont avancés pour arrêter la grève ont produit l’effet inverse », estime-t-il.

L’Unpef abonde dans le même sens. « Cette grève a montré le vrai visage du gouvernement. Il est aujourd’hui clair que ce gouvernement n’a aucune volonté de résoudre les problèmes du secteur », soutient Messaoud Amraoui, chargé de communication de l’Unpef. Ce dernier dénonce aussi l’atteinte aux libertés syndicales et le recul sur le droit à la grève. Par ailleurs, le ministère de l’Education pense déjà au rattrapage des cours. Plusieurs options ont été avancées par Boubekeur Benbouzid. « Soit on va déduire une semaine des vacances de printemps soit on va opter pour la dispense des cours tous les samedis durant un mois », explique-t-il.

Par Madjid Makedhi


Reprise partielle en Kabylie

Alors que les lycées étaient toujours paralysés hier dans les wilayas de Tizi Ouzou, Boumerdès et Bouira, une reprise timide des cours a été constatée dans les cycles primaire et moyen à travers certaines communes.

A Tizi Ouzou, où la plupart des établissements scolaires étaient toujours fermés, les deux sections syndicales initiatrices de ce mouvement de protestation, le Cnapest et l’Unpef, ont réuni leurs adhérents, durant toute la journée, pour décider de la date de la suspension effective de la grève. Toutefois, selon le coordinateur de wilaya de l’Unpef, Sarni Hacène, la reprise des cours est prévue pour ce lundi. Dans la wilaya de Bouira, un seul lycée sur 35 a ouvert ses portes pour accueillir les élèves, tandis que les autres paliers d’enseignement n’ont pas encore mis fin à leur débrayage. Dans la wilaya de Boumerdès, une reprise partielle des cours a été enregistrée dans le primaire et le moyen en attendant les lycées. Le Cnapest se prononcera aujourd’hui sur le maintien ou non de la grève.

Par A. T.


Les lycées fermés à l’est du pays

A Sétif, contrairement à leurs collègues du primaire et du moyen, bon nombre de professeurs de l’enseignement secondaire (PES) et technique, affiliés au Cnapest, persistent et signent.

La fin de non-recevoir des PES a une fois de plus paralysé les établissements du secondaire de la deuxième wilaya du pays en nombre d’élèves scolarisés. Selon certaines indiscrétions, le taux de suivi à Sétif a atteint 40%. Ce chiffre est démenti par les grévistes qui avancent le taux de 80%. A Constantine, les enseignants qui adhérent au Cnapest estiment qu’ils sont partagés entre un retour conditionné à leur poste de travail et une situation allant vers le pourrissement. « Rien n’est encore résolu, bien que toutes les données soient en faveur du maintien de la grève », précise Abdelhafid Boucetta, coordinateur de wilaya du Cnapest, ajoutant que « la décision reviendra au conseil national, qui se tiendra aujourd’hui ». « Je me demande si Boubekeur Benbouzid prend ces décisions tout seul ou on les lui dicte », s’interrogera notre interlocuteur. A Annaba, bien qu’ils soient contre la reprise des cours, les professeurs affiliés à l’Unpef ont rejoint leurs établissements respectifs, hier – 217 écoles primaires et 78 CEM que compte la wilaya.

« Lors de notre assemblée générale organisée avant-hier, tous les professeurs ont refusé la reprise des cours hier, imposée par la tutelle. Cependant le conseil national a décidé le contraire en obtempérant à la décision de justice. Nous avons suivi le mot d’ordre », a justifié Mahrez Yassine, président du bureau de wilaya. De leur côté, les enseignants affiliés au Cnapest, toujours en grève, attendent la décision de leur conseil national qui prévue pour aujourd’hui.

Par S. B., K. B., M. F. G.


Le Cnapest mobilisé à l’Ouest

La menace de suspension n’a pas eu le même effet dans les wilayas de l’Ouest sur le mouvement de grève. A Oran, l’Unpef a décidé de suspendre la grève.

Un appel à la reprise du travail a été décidé hier par les représentants locaux de ce syndicat, en conformité avec la décision du conseil national. Le Cnapest temporise et soumet la question à la base. Selon un cadre de cette organisation, 14 lycées ont décidé la poursuite de la grève contre 7 établissements favorables à la reprise du travail. 4 Lycées sur les 25 où le Cnapest est implanté (Oran en compte 55) n’avaient pas encore rendu leur décision hier après-midi. A Mascara, la grève dans les lycées se poursuit et, selon le coordinateur de wilaya du Cnapest, le taux de participation a atteint 70%. Contacté par nos soins, le chargé de la communication de la direction de l’éducation nous a communiqué un taux de 50%. A Sidi Bel Abbès, la grève des enseignants affiliés au même syndicat a été également suivie.

« Les délégués des 37 lycées de Sidi Bel Abbès se sont prononcés pour la poursuite de la grève malgré les menaces de sanction du ministère de l’Education », explique M. Boukerch, responsable du bureau local du Cnapest. A Chlef, les enseignants des deux paliers poursuivent leur mouvement de grève. Pratiquement, tous les établissements du moyen et du secondaire sont demeurés fermés hier, obligeant les élèves à rentrer chez eux. Pendant que les services de la direction de l’éducation distribuaient les mises en demeure aux enseignants, ceux-ci étaient réunis par leurs sections syndicales respectives pour s’exprimer sur la suite à donner à leur grève.

A Tlemcen, si dans le primaire et le moyen les cours ont repris normalement, en revanche dans le cycle du secondaire, seuls 79% des grévistes ont rejoint leurs salles de classe, selon une source de la direction de l’éducation. Un chiffre fortement contesté par le Cnapest qui affirme que 93% de ses adhérents boycottent toujours les cours.

De nos correspondants