Afrique – France: Un sommet sur fond de polémique

Afrique – France

Un sommet sur fond de polémique

Le Quotidien d’Oran, 4 décembre 2005

Le 23ème sommet «Afrique – France» s’est ouvert hier à Bamako (Mali), en présence des chefs d’Etat et des chefs de délégation de 53 pays africains et du président français, Jacques Chirac, pour débattre de la place, du rôle et de l’avenir de la jeunesse africaine. Pour la première fois, la totalité des pays du continent sont présents à ce sommet auquel participe également le secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan.

Comme les précédentes rencontres, le 23ème sommet Afrique – France sera marqué par des débats informels centrés sur un thème principal, à savoir «la jeunesse africaine, sa vitalité, sa créativité, ses aspirations». Les participants à cette conférence aborderont plusieurs sous-thèmes, à savoir «la formation et l’emploi» qui sera introduit par l’Algérie, «l’insertion sociopolitique et économique de la jeunesse dans le processus du développement de l’Afrique et le rôle important du commerce», «la vitalité et la créativité de la jeunesse africaine», «les phénomènes migratoires comme facteurs d’intégration»,… etc. Ces thèmes seront introduits au cours des trois séances de travail prévues durant ce sommet. L’agriculture, le commerce, l’environnement, la santé et l’éducation seront, également, au centre des discussions au regard de l’importance qu’ils revêtent.

Au cours de la réunion des ministres des affaires étrangères d’Afrique et de France, tenue jeudi dernier, le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, M. Mohamed Bedjaoui, avait relevé la nécessité d’encadrer et d’orienter la jeunesse africaine par les pouvoirs publics. Il a indiqué, dans ce contexte, que les jeunes Africains ont clairement défini, lors du forum de la jeunesse africaine tenu les 8 et 9 novembre dernier à Bamako, leurs préoccupations, aspirations et problèmes auxquels, a-t-il ajouté, «nous devons apporter toute notre attention». A ce titre, M. Bedjaoui avait lancé un appel aux participants à la réunion ministérielle pour «réfléchir ensemble aux meilleures réponses à l’attente de la jeunesse africaine», soutenant que «le partenariat euro-africain pour un développement authentique de l’Afrique est la seule solution à la problématique de la migration». Dans le même ordre d’idées, Bedjaoui a plaidé pour la promotion du développement

socioéconomique dans les zones africaines à fort potentiel d’émigration, appelant la communauté internationale à soutenir les efforts consentis par l’Afrique, dans le cadre du NEPAD, pour atteindre les objectifs du millénaire.

Intervenant, hier, à l’ouverture des travaux, le président français Jacques Chirac a invité la communauté internationale à laisser l’Afrique prendre toute sa place dans le commerce international. Evoquant les négociations en cours sur la libéralisation du commerce international, il a jugé que l’Afrique doit prendre sa juste place dans le commerce international, notamment agricole. «Les pays africains doivent recevoir la juste rémunération de leur travail. Nous ne pouvons accepter qu’une libéralisation hâtive et généralisée des échanges agricoles ruine les efforts des pays les moins avancés», a-t-il souligné. M. Chirac a de nouveau appelé les Etats-Unis à supprimer leurs subventions sur le coton, une matière première qui fait vivre des millions d’Africains, et il s’est engagé à convaincre l’Union européenne de porter son aide publique au développement à 0,7% du PIB d’ici 2015, à l’instar de la France qui vise cet objectif pour 2012. Il a également annoncé qu’il avait décidé de faciliter la délivrance de visas de longue durée à entrées multiples pour les «entrepreneurs, cadres, chercheurs, professeurs et artistes» africains, qui ont des activités «par nature liées à l’échange». Cette annonce intervient alors que Paris a durci sa lutte contre l’immigration clandestine. Enfin, le président français s’est prononcé pour la conclusion d’un traité sur les armes, jugeant que l’Afrique avait également la responsabilité de «mettre un terme aux crises meurtrières qui la secouent».

Ce sommet auquel participe le ministre des Affaires étrangères, M. Bedjaoui, intervient au moment où le parlement français a relancé la polémique en maintenant la loi du 23 février. Ce rejet par le parlement français de l’abrogation de la loi du 23 février faisant l’apologie du colonialisme en le qualifiant de «phénomène positif», n’en finit pas de susciter des réactions des deux côtés de la Méditerranée. Les partis de l’alliance présidentielle avaient été les premiers à monter au créneau. Le secrétaire général du FLN, M. Abdelaziz Belkhadem, avait affirmé que la position du parlement français «porte préjudice aux relations algéro-françaises». De son côté, le porte-parole du RND, M. Miloud Chorfi, s’est dit «stupéfait» par le maintien de cette loi malgré les voix qui se sont élevées appelant à son abrogation en France même. Le vice-président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), M. Abdelmadjid Ménasra, avait déclaré pour sa part que cette loi «est un mépris à l’encontre de tous les Algériens qui ont cru que la France de 2005 signerait un traité d’amitié avec l’Algérie».

Djamel B.